1816 – 2016 : cette année, tous les amoureux du chronographe fêtent le bicentenaire de son invention. Louis Moinet, l’auteur atteste de cette complication, est un horloger français né à Bourges en 1768. Son nom n’est pas encore totalement revenu au panthéon des grands horlogers mais il y mérite toute sa place. Sa pièce, appelée à l’époque « Compteur de Tierces », affiche le 1/60e de seconde. C’est donc bien plus que le premier véritable chronographe de l’histoire : le Compteur de Tierces de Louis Moinet a également posé les bases de la très haute fréquence, capable de mesurer des temps très courts. Cette fréquence n’a d’ailleurs été égalée qu’un siècle plus tard sous l’impulsion d’un certain Jack Heuer, dont le nom appartient lui aussi à la postérité chronométrique.
LE PETIT POUSSOIR DE LÉON BREITLING
Si les fondations techniques du chronographeont été posées il y a 200 ans, son évolution a accompagné la plupart des grands progrès de l’humanité au cours du XXe siècle. Depuis l’essor de l’aviation jusqu’aux courses automobiles en passant par les performances sportives et la conquête spatiale, le chrono est une complication horlogère déterminante de l’ère moderne. La version monopoussoir de Louis Moinet de 1816 est restée insurpassée pendant un siècle.
À sa suite, l’on y adjoint l’heure, avant de basculer l’ensemble de la poche au poignet. En 1934, Léon Breitling lui donne sa physionomie quasi définitive : une montre ronde avec heure et chrono, dotée de deux poussoirs indépendants, l’un pour marche / arrêt, l’autre pour remise à zéro. Cette configuration fait encore largement autorité.
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CHRONOGRAPHE OU CHRONOMÈTRE ?
L’usage alterne sans réelle différence entre chronographe et chronomètre. Pourtant, il en existe une de taille. Un chronographe est une pièce capable de mesurer des temps courts avec une précision constante, portant au minimum connaissance des heures, minutes et secondes et capable de les afficher. Un chronomètre fait exactement la même chose mais doit, pour bénéficier de ce titre, attester d’une précision contrôlée par un organisme externe appelé COSC (Contrôle Of ciel Suisse des Chronomètres). Le COSC applique pour cela les prescriptions de la norme ISO 3159 et ses sept critères de précision, le tout sur une période de tests de 16 jours. Plusieurs maisons n’hésitent toutefois à dépasser ces critères : Rolex avec son Superlative Chronometer, Chopard et Parmigiani avec la certification Qualité Fleurier, etc.
JEU DE PISTES
L’essor de deux disciplines bien précises a considérablement favorisé les progrès du chronographe : l’aviation lui a donné une esthétique bien particulière (celle des tableaux de bord), l’automobile l’a conduit à devenir beaucoup plus précis (1/100e de seconde) et lui a appris à mesurer différents temps successifs et /ou intermédiaires.
C’est cette dernière qualification, celle des temps successifs ou intermédiaires, qui est de loin la plus technique. Le chronographe doit être capable de lancer deux mesures simultanées ou consécutives, de les stopper ou relancer à la demande tout en enregistrant les mesures déjà effectuées. Un jeu d’enfant avec une électronique à quartz, un casse-tête pour une horlogerie purement mécanique !
SON ALTESSE LA RATTRAPANTE
Le chronographe à rattrapante est l’empereur de ces complications. Il se distingue par sa physionomie : c’est le seule qui possède deux grandes aiguilles centrales de chrono. Il permet de chronométrer des phénomènes commençant en même temps mais de durées différentes (comme une épreuve sportive à plusieurs concurrents). Au moment du déclenchement, les deux aiguilles sont superposées. Une pression sur le poussoir arrête la première alors que la seconde poursuit sa progression. Après lecture de la mesure, une deuxième pression sur le poussoir libère la première qui revient se superposer avec l’autre, en la rattrapant, d’où le nom de « chronographe à rattrapante ».
Le chrono « retour-en-vol » ne possède pour sa part qu’une seule aiguille. Sa fonction est très simple : permettre à cette aiguille de revenir à zéro sans devoir être préalablement arrêtée. Une fois que la mesure est lancée, une simple pression sur un poussoir dédié permet donc de faire revenir instantanément tous les compteurs à zéro et d’engager immédiatement une autre mesure. On dit que l’aiguille des secondes revient à zéro alors qu’elle est déjà « en vol », d’où le nom de la complication.
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RM 011-03 LA LÉGENDE ÉVOLUE
Depuis 10 ans, c’est l’un des best- seller de Richard Mille. Dans sa nouvelle version, chacun des composants de la RM 011-03 a été travaillé pour révéler son côté technique et fonctionnel. La pièce a également considérablement gagné en couleur afin de renforcer sa profondeur architecturale. Par l’usage intensif du carbone et du titane, la RM 011-03 trahit ses ascendances automobiles dans les moindres détails, sans rien renier à des finitions de haute horlogerie.
CADENCES INFERNALES
Au-delà de ces deux grands types de chronographes, l’enjeu du siècle porte sur sa fréquence. Plus le mouvement qui bat au cœur du chrono est rapide, plus sa précision est grande. L’immense majorité des chronographes est cadencée en trois fréquences : 3 Hz, 4 Hz ou 5 Hz, permettant ainsi de mesurer avec une précisionallant de la seconde jusqu’au 1/100e de seconde. Certains horlogers ont depuis largement dépassé ces fréquences de référence. TAGHeuer a par exemple mis au point en 2011 la Mikrotimer Flying 1000, cadencée à 500 Hz, soit 100 fois plus rapide que la moyenne des chronos classiques. Son aiguille centrale réalise dix tours complets par seconde !
Pourtant, l’année suivante, TAG Heuer allait encore plus loin avec la Carrera Mikrogirder 2000. Plus simple, plus rapide et plus efficace que tout ce que la science croyait possible, résistante à la gravité et réduisant de manière spectaculaire le risque d’erreur de transmission, elle est capable de mesurer le temps jusqu’au 5/10000e de seconde. Un OVNI dans la galaxie horlogère qui n’a pas été commercialement exploité. Trop technique... et trop cher ? La pièce était estimée à plus de 100 000 euros mais a eu le mérite de propulser le chronographe dans le XXIe siècle.
TYPE XXI : LE RETOUR GAGNANT
Louis Breguet (1880 – 1955) était un pionnier de l’aviation. Industriel visionnaire, il pose dès 1906 les bases du transport aérien dans son ensemble. Invente le gyroplane en 1907, qui deviendra l’hélicoptère. Développe le concept de meeting aérien en... 1909 ! Gagneses premiers records de vitesse deux ans plus tard. Met au point des biplans comme le Breguet 14, dont la contribution en 1914-1918 l’a baptisée d’un patronyme qui ne laisse aucun doute quant à ses qualités : « L’avion de la victoire ». Certains modèles ultérieurs volaient à 6000 mètres, échappant ainsi aux tirs sol-air. Un record, qui sera suivi de nombreux autres, dont les premiers vols commerciaux internationaux. Dans la foulée, Louis Breguet créa sa propre compagnie, Air Union. Son nom actuel ? Air France !
Dire que le type XXI est une pièce historique est donc un doux euphémisme. Dessinée dans les années 1950, sa refonte 2016 offre un cadran gris ardoise délicieusement vintage – et une première sur ce modèle. On y retrouve tous les codes esthétiques qui ont bâti la légende Breguet, notamment la boite ronde finement cannelée. D’un diamètre de 42 mm pour favoriser la parfaite lisibilité de ses chiffres arabes luminescents, la pièce se pare d’un fond saphir qui permet d’admirer les moindres détails de son calibre manufacture. Ce mouvement chronographe à remontage automatique avec fonction retour- en-vol, numéroté et signé Breguet, offre 48h de réserve de marche et un échappement en silicium qui lui assure longévité, précision et insensibilité aux variations thermiques et magnétiques.