Les manufactures horlogères chassent de multiples lièvres à la fois. C’est une quête vers toujours plus d’étanchéité, de résistance, de précision, de durabilité, de complications, d’ergonomie, etc. En réalité, seules deux de ces valeurs forment le Graal de la Haute Horlogerie : précision et résistance. Une montre qui ne donne pas la bonne heure ni ne s’avère capable de traverser les générations se résumerait à un objet jetable. C’est l’opposé de la Haute Horlogerie : un luxe pérenne, transmissible, la recherche d’une précision absolue. Un certain nombre de manufactures investissent considérablement pour faire avancer la science horlogère. Ensemble, elles esquissent le portrait robot de la montre demain.
LÉGÈRETÉ ET RÉSISTANCE : UN DUO D’AVENIR
Ce que l’on en sait déjà est qu’elle sera légère. Le temps où poids et qualité étaient corrélés est révolu. L’homme derrière ce changement de paradigme : Richard Mille. Créée au tournant du millénaire, sa marque a d’emblée posé les jalons de l’horlogerie de demain. Son Crédo, pourtant antinomique : plus c’est léger, plus c’est résistant !
Qu’il s’agisse de la montre du sprinter Yohann Blake ou de la célébrissime RM 27-02 de Rafael Nadal, Richard Mille a fait tomber toutes les barrières et continuera de le faire. Le quartz TPT du boîtier de cette pièce est composé de 600 couches de carbone, résine et silice. Le mouvement qui y bat ne pèse que 3,5 grammes. Pourtant Rafael Nadal lui inflige régulièrement des accélérations de 10 à 12 G !
PRÉCISION : UNE QUÊTE SANS FIN
Une montre de haute horlogerie se doit d’être la plus précise possible. On sait d’ores et déjà que la montre de demain fera un large usage du silicium. Aujourd’hui, le spiral en est ainsi réalisé. C’est lui qui assure à la montre la régularité de son battement et, progressivement, tout l’échappement de la montre devrait basculer en silicium.
L’ajout de tourbillon permettra aussi de gagner en précision. Aujourd’hui, la manufacture Roger Dubuis en utilise parfois deux au sein de la même montre. Ensemble, ils compensent les effets négatifs que la gravité exerce en permanence sur les composants d’un mouvement horloger. Breveté en 1801 par Abraham-Louis Breguet, il continuera d’être une complication aussi appréciée des collectionneurs qu’utile à la précision de leur montre.
RÉSISTANCE AUX CHOCS : TOUT EN SOUPLESSE
Les montres actuelles sont capables d’encaisser des chocs et chutes d’une violence certaine. La clé de cette réussite tient à un système aussi inventé par Abraham-Louis Breguet : le pare-chute. Cette géniale invention repose sur un système de cône guidé qui permet à chaque pivot de roue de rester à sa place lorsqu’il reçoit un choc. Aujourd’hui, cette invention est plus connue sous le nom déposé du composant qui a su l’industrialiser : Incabloc.
Breguet a récemment révolutionné le procédé en renversant complètement son paradigme : au lieu d’essayer de maintenir en place le pivot d’une roue sur sa surface de contact, il est bien plus aisé... de supprimer cette surface de contact. Ainsi est né le pivot magnétique. Il permet au pivot d’une roue d’être en suspension dans son axe. En cas de choc, c’est la force magnétique qui le remettra automatiquement en place. Cette invention devrait occuper une place prépondérante dans la montre de demain.
ÉTHIQUE : UNE AFFAIRE EN OR
Les générations à venir devraient porter une attention accrue à l’origine de leur montre et de ses matériaux. Dans cette perspective, l’initiative « Fairmined » de Chopard devrait produire des effets durables sur la montre de demain. Ce label permet de garantir que la pièce a été produite avec un or dont on peut tracer la provenance et certifier le caractère écologiqueet équitable. Le succès est au rendez-vous. Il est à parier que d’autres métaux (comme le platine) seront amenés à suivre ce chemin, sans même parler du cuir des bracelet, entre autres.
La montre de demain...par Richard Mille
MOUVEMENT SUSPENDU
Pour contrer la rudesse des chocs et briser l’onde vibratoire qui se transmet du poignet, à la boîte puis au mouvement, Richard Mille a suspendu ce dernier. Le calibre de la RM 53-01 flotte littéralement dans le vide, reliée au boîtier par un système de poulies coulissantes filant un câble de seulement 0,27 mm de diamètre. L’ensemble peut absorber des accélérations pouvant atteindre 5000 G.
VERRE SAPHIR FEUILLETÉ
Une évidence en automobile (pare-brise), une nouveauté en horlogerie : la RM 53-01 voit son verre saphir composé de deux couches de verre saphir taillées dans la masse au centre desquelles est placé un film de polyvinyle translucide, anti reflet, empêchant lors d’un choc la fragmentation du saphir en multiples éclats qui seraient fatals au mouvement.
ARCHITECTURE EN ARCHE
Les ponts centraux de la RM 53-01 sont en forme d’arche. C’est la géométrie la plus résistante de toutes, celle sur laquelle sont bâties les cathédrales. Les ponts en double arche de la pièce lui permettent de fixer chaque composant du mouvement avec une rigidité exceptionnelle.
BOÎTIER EN CARBONE TPT
Cet alliage de carbone est composé de 600 couches superposées de carbone, de 30 microns chacune, saturées de résine, avant que leurs fibres interstitielles ne soient réorientées à 45° et l’ensemble chauffé à 120°C. Le boîtier qui en résulte est presque indestructible.
RÉGULATION PAR TOURBILLON
Breveté en 1801 par Abraham-Louis Breguet, le tourbillon reste l’échappement le plus précis au monde. Il compense les effets de la gravité sur la précision du mouvement. Sa fragilité le rendait jusqu’à aujourd’hui incompatible avec des pièces à caractère sportif. Richard Mille a prouvé le contraire.